L'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole

Publié le par makhnovitch

Nous allons commencer une longue étude de l'OPEP qui se déclinera en une série d'articles. Le premier présente l'OPEP, son histoire et son fonctionnement.

L'OPEP
L'Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole


Après avoir étudié en détail la situation de la production en dehors de l'OPEP et de l'ex-URSS le mois dernier, avec les pics de production de décembre 2003, le point d'inflexion d'octobre 2004 et le pic de mai 2005, nous allons maintenant aborder la question complexe de l'OPEP.

L'OPEP regroupe actuellement 12 pays dont le dernier, l'Angola, qui y est entré au début de l'année 2007.

La liste des 12 pays membres est la suivante : l'Arabie Saoudite, l'Iran, l'Irak, le Koweit, le Qatar, les Emirats Arabes Unis, le Vénézuela, l'Algérie, la Lybie, Le Nigéria,  l'Indonésie et l'Angola.

Au sein de l'OPEP, 6 pays sont situés au Moyen-Orient, 4 en Afrique, 1 en Amérique du Sud et 1 en Asie.

Faisons un peu d'Histoire maintenant...

L'OPEP a été créée le 14 septembre 1960 à l'initiative du Vénézuela et de l'Iran pour faire face à la chute des prix du baril qui valait à l'époque moins de 5 dollars.

Les membres fondateurs n'étaient alors que 5  : l'Arabie Saoudite, l'Iran, l'Irak, le Koweit et le Vénézuela.

Ensuite vinrent le Qatar en 1961, l'Indonésie en 1962, la Lybie en 1962, Abou Dhabi en 1967 (qui deviendra, avec ses voisins, les Emirats Arabes Unis en 1971), l'Algérie en 1969, le Nigéria en 1971 et l'Angola en 2007.

Deux pays ont eu une vie éphèmère au sein de l'OPEP ; il s'agit de l'Equateur entré en 1973 et sorti en 1992, du Gabon entré en 1975 et sorti en 1994.

Deux autres pays vont prochainement entrer dans l'OPEP  : le Soudan dont la production est actuellement en forte croissance, et l'Equateur qui reviendra dans l'organisation. 

Cela portera donc le nombre de pays membres à 14.

La Bolivie a fait aussi part de sa volonté d'entrer dans l'OPEP mais sa production est trop mineure.

A la sortie de la Seconde Guerre Mondiale, l'Europe était en ruine, alors que les USA et l'URSS étaient devenus les deux grandes puissances mondiales.
Tout deux avaient d'immenses réserves de pétrole et de charbon. Il s'en est suivi la Guerre Froide.  A cette époque, les USA étaient de loin le principal producteur mais aussi le premier consommateur de pétrole. En 1948, l'immense gisement d'Arabie Saoudite, "le Roi des Rois des gisements", Ghawar, est découvert. C'est à partir des années 50 que la production de pétrole en dehors des USA va commencer à croitre de manière exponentielle jusqu'en 1980.

(
Pour mieux comprendre la répartition de la production de pétrole au fil du temps, je vous conseille d'aller voir le graphique sur oilposter.org et de commander ce poster très parlant qui permet de mettre en évidence le pic pétrolier. )

Sur ce poster, on peut voir clairement que les US passent du statut de principal producteur dans les années 50 à celui de producteur certes important mais minoritaire dans les années 70.

Laissons les chiffres parler...

En 1950, la production des USA est de 1,97Gb/an
(milliards de barils par an) alors que la production mondiale est d'environ 4Gb/an. A cette époque, les USA produisent donc 50% de la production mondiale. L'ex-URSS ne produit qu'environ 0,2Gb/an et le Moyen Orient 0,62Gb/an.

En 1960, la situation est bien différente. La production des USA est passée  à  2,56Gb/an mais la production mondiale a doublé (8Gb/an).
Aussi, la part de production des USA dans la production mondiale n'est plus que de 32%. La production du Moyen-Orient est alors de 1,83Gb/an et a donc triplé en 10 ans.
La production de l'ex-URSS est passée à 0,86Gb/an, et a quadruplé en 10 ans.
Le reste du monde, à l'exception de l'Europe, qui produit déjà 0,2Gb/an, produit 2,55Gb/an,  c'est à dire autant que les USA.

C'est en 1960 que l'OPEP est constituée. A cette époque, il y a un excès de production par rapport à la demande et les producteurs ont du mal à empêcher les prix de s'effondrer. Le but de l'OPEP est alors de maintenir le niveau de prix du baril. Les sept grandes compagnies pétrolières américaines restraignent aussi leur production pour maintenir les prix mais, au fur et à mesure que l'industrie pétrolière se développe, de plus en plus de producteurs indépendants arrivent sur le marché et refusent de limiter leur production.

En 1959, un événement d'instabilité supplementaire entre en scène : les réserves conséquentes de la Lybie sont découvertes. Ce pays se trouve près de l'Europe et peut exporter facilement son pétrole vers les USA. Aussi, ces découvertes menacent-elle le contrôle que les compagnies pétrolières exercent sur les prix. En 1969, Kaddafi arrive au pouvoir et prend le controle de ces gisements de pétrole et soutient l'OLP, L'IRA et l'ANC. 

En 1963, le pic des découvertes mondiales est atteint : on ne découvrira plus jamais autant de pétrole que cette année là.

En 1965, la production du Moyen-Orient dépasse celle des USA.

En 1970, la situation du marché pétrolier change radicalement et la production des USA atteint 3,39 Gb/an. En 1971, sa production parviendra à son pic à 3,44 Gb/an.
A cette époque, la production mondiale sélève quant à elle à 17 Gb/an ;
soit deux fois plus qu'en 1960.

Entre 1950 et 1970, la part de la production des USA dans la production mondiale évolue de 50% à 20%.

Toujours à cette époque, la production du Moyen-Orient atteint 4,59 Gb/an et a donc plus que doublé en 10 ans. Sa part dans la production mondiale atteint 27%.
Quant à L'ex-URSS, elle produit 2,08 Gb/an, soit une augmentation de 200% en 10 ans.
L'Europe produit 0,5 Gb/an et le reste du monde atteint 6 Gb/an. Sa production a ainsi presque triplé.

En 1971, la production des USA commence son lent déclin.  Les USA deviendront de plus en plus  dépendants des importations de pétrole pour satisfaire une consommation orgiaque. Les Etats-Unis importent en 2007 les deux tiers du pétrole qu'ils consomment.

Jusqu'à la fin des années 60, les USA possédaient une capacité supplémentaire de production avec laquelle ils pouvaient jouer pour influer sur les prix mondiaux du pétrole. Au cours des années 60, avec le plafonnement de la production des USA et la croissance exponentielle de la demande intérieure, cette capacité supplémentaire s'est réduite progressivement pour devenir inexistante.

Quand sa production a atteint un pic en 1971, les USA étaient déjà devenus importateurs de pétrole. Dans le même temps, les principaux membres actuels s'étaient organisés au sein de l'OPEP.

L'OPEP se fera connaitre du monde lors de l'embargo de 1973 conduisant au premier choc pétrolier. C'est à ce moment que l'OPEP prend sa place dans le marché mondial du pétrole et regroupe désormais les pays qui possédent la capacité supplémentaire de production permettant d'ouvrir ou de fermer les "robinets" pour réguler les prix à sa guise.

 1973 : La guerre du Kippour

Les compagnies occidentales négociant régulièrement le prix du pétrole avec les pays exportateurs, les pays arabes du Moyen-Orient sont devenus des interlocuteurs cruciaux pour les occidentaux concernant l'achat de pétrole. A sa création en 1948, Israël est entré
en confrontation avec les pays arabes. Depuis lors, Israël reçoit un soutien inconditionnel, à la fois militaire et économique, des USA. A la sortie de Seconde Guerre Mondiale, le prince Ibn Saudi et Roosevelt conclurent des accords selon lesquels l'Arabie Saoudite s'engageait à livrer les USA en pétrole brut en échange de la protection militaire des USA pour sécuriser les exportations de l'Arabie Saoudite.

Lorsqu'en 1967, Israël sortit vainqueur la Guerre de 1967 contre les pays Arabes, prenant le contrôle du Sinaï, une paix provisoire fut conclue. Le président égyptien Sadat proposa une paix permanente si les Israéliens se retiraient des territoires occupés, mais Israël refusa. Comme aucun progrès n'était fait, Sadat décida de conduire une guerre avec des objectifs clairs. En octobre 1973, Les égyptiens attaquèrent les Israéliens dans le Sinaï. Equipés avec du matériel sovietique, les égyptiens détruisirent la riposte aérienne israélienne. Mais les USA procurèrent des avions de remplacement, et les troupes israéliennes se préparèrent à traverser le Canal de Suez.  Une flotte russe, basée dans les eaux méditerranéennes, menaça d'intervenir et de mener le conflit vers une confrontation militaire directe entre les deux superpuissances. Pour éviter la catastrophe, Israël et l'Egypte furent forcés de négocier un cessez le feu.

Les pays arabes se trouvaient à cette époque là en pleine négociation sur les prix de vente de leur pétrole aux Occidentaux. Parce que les US avaient soutenu massivement Israël dans cette guerre, les pays arabes céssèrent toutes négociations et imposèrent un embargo aux USA et à d'autres pays. Cela provoqua une montée des prix de 400% : le prix du baril passa de 3$ à 12$ en quatre mois. Les automobilistes américains se retrouvèrent prisonniers de longues files d'attentes aux pompes à essence. Cet évènement marqua le début du contrôle effectif des prix par l'OPEP.

Depuis lors,
par sa capacité à agir sur sa production monumentale, l'Arabie Saoudite reste le principal acteur dans cette régulation des prix . Or, ce pays est lié aux USA, agissant pour l'intérêt mutuel des USA et du sien. Aussi, en échange de ventes d'armes massives, l'Arabie Saoudite agira-t-elle par la suite sur les prix dans l'intérêt des USA. 

Le choc pétrolier de 1973 engendra une inflation de plus de 10% dans les pays Occidentaux, entrainant une crise économique jusqu'en 1982. La prospérité d'après guerre a pris fin en 1973.

Le choc pétrolier de 1979

En 1979, le peuple d'Iran renverse le régime autoritaire du Shah d'Iran, mis en place par la CIA en 1953. Par ailleurs, ce renversement du régime du Shah d'Iran entraîne la guerre Iran-Irak. L'irak était à l'époque soutenu par les USA dans le but de punir les iraniens, mais aussi de s'enrichir par des ventes d'armes massives. Ce bouleversement occacionne des pénuries d'essence en Europe.
A l'époque, le prix du baril atteint 30$ et la récession économique va durer jusqu'en 1982, avec une inflation galopante.

Cette situation va inciter les pays Occidentaux à développer des sources d'énergie alternatives, à prendre des mesures de conservation de l'énergie et à rechercher de nouveaux gisements de pétrole. De ce fait, les investissements dans le nucléaire vont augmenter considérablement. Les mesures de conservation de l'énergie permettent à cette époque de limiter la progression de la consommation. D'importantes découvertes de pétrole sont alors faites dans la Mer du Nord, les côtes du Nigéria et de l'Angola, au Mexique et en Alaska. Ce qui va permettre de limiter la dépendance des pays Occidentaux vis-à-vis de l'OPEP et amener la production mondiale de pétrole à dépasser la demande, entrainant une baisse des prix. Les économies occidentales reprennent alors des couleurs et les bourses de New York, de Londres et de Paris retrouvent une nouvelle jeunesse.

AU début des années 80, L'OPEP doit alors faire face à sa responsabilité de grand ordonnateur des prix mondiaux du pétrole. Cette responsabilité est difficile à porter et les pays de l'OPEP inventent alors le système des quotas.


Années 80 : La guerre des quotas

Le système des quotas de production a été établi pour éviter que les prix du pétrole ne baissent trop. Chaque pays se voit attribuer un niveau de production qu'il est censé respecter. Ce niveau de production est calculé sur les réserves annoncées par le pays.

C'est à partir de 1983 que la guerre des quotas a démarré, s'intensifiant dans la deuxième moitié des années 80. En 1982, les prix chutent suite à une production trop importante. Les pays de l'OPEP baissent les quotas de production pour y faire face. Mais certains ne jouent pas le jeu. Pour remonter leur quotas, quelques uns commencent à artificiellement gonfler leurs réserves annoncées sans qu'on puisse attribuer cela à une quelconque découverte.
En 1983, l'Irak commence modestement. Mais en 1985, le Koweit voit les choses en grand et augmente ses réserves d'un tiers, c'est à dire de 30 Gb, l'équivalent des réserves ultimes de la Grande Bretagne. 1985 est l'année ou la production de l'OPEP atteint son plus bas jamais niveau enregistré.

Nous verrons par la suite dans les graphiques des pays de l'OPEP que, pour chaque pays, l'année de l'augmentation de ses réserves correspond à l'année où sa production repart à la hausse. Il faut bien comprendre que ces pays faisaient face à la baisse de prix mais que le système des quotas les obligeaient à amputer leur production, aggravant le manque à gagner.

En 1985, les Etats Unis, dirigés par l'Administration Reagan, se trouvaient engagés dans une nouvelle course aux armements ( nom de code : Stars Wars) avec les sovietiques. Les sovietiques financaient leur économie et cette nouvelle course aux armements grâce aux devises qu'ils récupéraient par la vente de leur pétrole à l'étranger. Leur production de pétrole était alors très importante, mais proche du pic qui aura lieu 1987 à 12 mb/j.  Alors que le Koweit se mettait à tricher sur ses réserves pour augmenter sa production, que l'Iran trichait aussi sur sa production pour financer la guerre contre l'Irak, l'Arabie Saoudite produisait à la moitié de son quota de production. Margaret Thatcher indexa les prix du pétrole de la Mer du Nord sur les prix de l'OPEP et les laissa fluctuer selon le marché. Thatcher et Reagan décidèrent les saoudiens à augmenter leur production pour inonder le marché de pétrole et provoquer une chute des prix mondiaux. Ceux-ci descendront à moins de 10$ le baril. Les dommages furent importants pour l'économie soviétique et furent sûrement parmi les causes majeures de la chute de l'Empire Soviétique dans les années suivantes. L'arrivée du pic de production de l'Empire Soviétique en 1987 accentua la dégradation déjà avancée du régime. Mais la chute des prix du pétrole entraina aussi des dégâts dans les pays occidentaux et Reagan et Thatcher menacèrent d'imposer des tarifs.  L'Arabie Saoudite sortie victorieuse de cet événement et son pouvoir augmenta sur le marché mondial. Cela entraina une méfiance accru des USA vis-à-vis des saoudiens et ceux ci renforcèrent leur présence militaire au Moyen-Orient. Ils diversifièrent aussi leur importations de pétrole avec le Mexique, la Colombie, l'Equateur et la Canada. Ce changement notable de la géopolitique mena à la première Guerre du Golfe en 1990. 

Voici un tableau (ci dessous) montrant les réserves officielles annoncées par les pays de l'OPEP au fil des années (ce tableau est tiré d'un document powerpoint de Upsala University, réalisé par Mr Aleklett de l'ASPO). Les changements brutaux des réserves y sont signalés en orange. On peut noter aussi que les chiffres de réserves ne changent pas à la suite des changements brutaux mais reste d'un constance impossible dans le monde réel. Ces chiffres n'ont absolument rien à voir avec la réalité. Certains analystes, comme Colin Campbell, disent que ces chiffres correspondent à la quantité totale de pétrole exploitable dans ces pays. Aussi, ces chiffres indiqueraient la quantité de pétrole déjà extraite ajoutée à la quantité de pétrole restante à extraire. Mais d'autres analyses montrent que ces chiffres seraient même surévalués.

Prenons l'exemple de l'Arabie Saoudite. Des analyses avancent le chiffre de réserves ultimes exploitables entre 165 Gb et 180 Gb. Ce nombre est à 90 Gb en dessous du nombre officiel montré dans le tableau ci dessous qui est de 259 Gb. Ces 90 Gb représentent trois fois les réserves totales de la Norvège. 
Début 2007, il a été extrait environ 110 Gb de pétrole des tréfonds de l'Arabie Saoudite. Il ne resterait donc que 55 à 70 Gb de pétrole à extraire au lieu de 259 Gb comme l'annonce le tableau suivant. Cela signifierait que les chiffres officielles des réserves de l'Arabie Saoudite sont surévalués de plus de 200 Gb ! Selon les chiffres données par Colin Campbell, 200 Gb, c'est environ 40% des réserves de pétrole conventionnel dans le monde en dehors des pays du Moyen-Orient  !


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On peut voir que
le Koweit augmente ses réserves de 26 Gb en 1985. En 1988, Abou Dabhi a augmenté ses réserves de 61Gb, le Vénézuela de 31 Gb, Dubai de 2,6 Gb, l'Iran de 44 Gb, l'Irak de 53 Gb. Le cas de l'Irak est assez comique dans ce jeu de "poker menteur" puisque celui-ci place ses réserves juste au-dessus des autres... avec de surcroit un nombre  rond :100 Gb.
Enfin, l'Arabie Saoudite augmente ses réserves de 88 Gb en 1990. Là aussi, on ne peut manquer de voir la correspondance avec la première guerre du Golfe, moment où l'Arabie Saoudite a dû compenser la chute de production du Koweit et de l'Irak.
Ajoutons pour finir que ces hausses ne correspondent à aucune découverte à cette période.

Si l'on additionne toutes ces hausses de réserves, on arrive à la coquette somme de 300 Gb. Ainsi, ces 300 Gb ne sont en fait que des réserves fantômes qui n'existe pas dans la réalité. En 1982, la somme de réserves des 9 pays de ce tableau atteignait 375 Gb. En 1990, elle était passée à 700 Gb. En 2002, elle avait atteint 735 Gb.

Makhnovitch.

Publié dans OPEP

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Fournisseurs et clients remettent aujourd'hui en question la nature des contrats de livraison à long terme. La durée devrait, selon eux, être nettement réduite (au maximum deux à quatre ans), et la partie ToP devrait correspondre aux besoins effectifs de l'acheteur, et non plus à une quantité de référence fixée à l'avance. Ils souhaitent par ailleurs voir disparaître les clauses de reconduction tacites des contrats. Par ailleurs, selon l'Office fédéral allemand des cartels, l'indexation du prix du gaz naturel sur le pétrole favorise le renchérissement des deux énergies et empêche l'apparition d'un marché libre du gaz, tel qu'il est souhaité par l'UE. Les arguments suivants sont avancés : à mesure de la diminution des réserves pétrolières, le prix du pétrole continuera à augmenter. Or, en ce qui concerne le gaz, les réserves sont nettement plus importantes et dureront bien plus longtemps. Par le biais de l'indexation des prix, la perspective d'une pénurie prochaine du pétrole a donc pour effet de pousser le prix du gaz naturel à la hausse, même si ce dernier est encore suffisamment abondant. Historique Depuis le développement du gaz, c'est une énergie en forte concurrence avec d'autres énergies. La problématique est très liée à la physique, la livraison de gaz est une affaire de connexion de point à point : quand un gazoduc relie l'Algérie à l'Espagne, on ne peut pas vendre ce même produit aux Etats-Unis. Alors on a créé des formules pour corréler le prix du gaz au produit le plus concurrentiel, pour rendre le gaz compétitif. Le gaz est moins cher que le pétrole à même équivalent énergétique, c'est injuste pour un producteur, mais les courbes de prix suivent exactement les mêmes évolutions. Dans les contrats de long terme, il s'agit de formules glissantes sur 6 mois : on constate donc d'une part un amortissement de la volatilité du prix du baril de brut, car les formules se basent sur des moyennes, et d'autre part un décalage temporel entre les prix du pétrole et du gaz. On imagine qu'un transfert de corrélation va avoir lieu : le prix du gaz ne sera plus corrélé au prix du pétrole, mais au prix de l'électricité, du fait de l'usage final du gaz qui concerne de plus en plus la production d'électricité. Notamment vis-à-vis des pays qui ont renoncé au nucléaire. Les contrats de long terme sont encore « obligés » d'indexer le prix du gaz sur celui du pétrole, puisqu'il faut que le gaz soit plus compétitif qu'une énergie substituable. Mais le GNL sera de plus en plus corrélé aux prix de l'électricité et les contrats de long terme vont basculer. De toute façon, gaz, pétrole et électricité sont très corrélés en termes de prix : les sous-jacents restent les mêmes. Jusqu'au milieu des années 1990, le gaz naturel servait surtout à se chauffer : il a été utilisé en Europe avant tout comme combustible de chauffage et pour la production de chaleur industrielle. En revanche, il n'était guère employé dans les centrales électriques. En l'espace d'une décennie, la part du gaz dans la production d'électricité dans les pays de l'UE est toutefois passée de 7 % à 18 % environ. Les spécialistes sont globalement d'avis que la demande mondiale de gaz, entraînée surtout par la production d'électricité, augmentera considérablement à moyen terme. En Europe, la transformation de gaz en électricité continuera à gagner en importance, face au charbon et à l'énergie nucléaire. Pour l'instant, la fixation des prix sur les deux marchés est très différente. Si de nombreux pays ont mis sur pied des bourses de l'électricité, il n'existe pour l'instant que peu de bourses du gaz. Mais à en croire l'Agence Internationale de l'Energie à Paris, on assiste à une convergence croissante des prix de gros du gaz et de l'électricité sur les marchés libéralisés. L'évolution historique des prix aux Etats-Unis montre que, même en l'absence d'indexation, les prix du pétrole et du gaz fluctuent de manière plus ou moins parallèle. Depuis des décennies, le prix annuel moyen du gaz à la production aux USA (Wellhead Price) suit en effet avec un certain délai celui du pétrole (First Purchaser's Price). La même constatation est faite, à moyen terme, pour les cours du gaz et du pétrole sur le marché à terme de New York (NYMEX). L'expérience américaine montre qu'il existe un lien indirect entre les prix du gaz et du pétrole, qui s'explique surtout par la concurrence acharnée que se livrent les deux énergies. Il existe un lien similaire entre les prix du charbon et du pétrole, il existe aussi un lien logique entre ces énergies et l'électricité produite par n'importe quelle source. Ainsi donc, les prix des différentes énergies tendent à se rapprocher, même en l'absence de dispositions contractuelles prévues à cet effet. Les contrats de vente Nous devons savoir qu'un marché unique du gaz n'existe pas, à la différence du marché du pétrole. Contrairement au baril de brut en effet, le gaz est surtout transporté par tuyau (gazoduc) ou sous forme liquide (GNL) non par bateau, un mode de transport couteux. Le prix du gaz diffère de pays en pays : les tuyaux ne sont pas les mêmes, les contrats d'approvisionnement entre clients et fournisseurs non plus. En Europe continentale par exemple, le gaz est fourni par les pays producteurs principalement sur la base de contrats à long terme (20, 30 ans) avec clause ‘Tak or Pay'. Avec ce système, les acheteurs s'engagent à acheter et payer une quantité minimum de gaz (par exemple 80 % du volume total commandé), quels que soient leurs besoins. Ces contrats à long terme donnent aux producteurs de gaz et aux exploitants de gazoducs la garantie qu'ils pourront écouler une quantité de gaz minimale, fixée à l'avance : de quoi assurer le financement des investissements lourds pour construire les infrastructures. Pour l'acheteur, ces contrats à long terme constituent aussi une garantie en termes de sécurité d'approvisionnement. Les clients et fournisseurs souhaitent que le coût de long terme soit juste. Le gaz est donc comparé à des produits d'échange qu'il peut remplacer tels que le fioul, le mazout, le pétrole. La composition des paniers de produits hydrocarburés d'indexation diffère selon les types de contrats. Clauses de renégociation, dates, pénalités, délais de livraison permettent aussi de construire une certaine flexibilité pour fonctionner sur le long terme. L'adaptation a généralement lieu chaque trimestre ou chaque semestre, en vertu de clauses de droit privé qui sont tenues secrètes, tout comme les contrats de livraison. Les tarifs régulés de GDF Suez appliqués aux consommateurs pour le gaz sont revus tous les trois mois par exemple. »On regarde la variation du prix de l'indexation durant les six mois préc&
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